Smart cities, smart citizens

Londres : gouvernance, plateforme de données et inspiration

Image par Enrique de Pixabay Londres : gouvernance, plateforme de données et inspiration
Image par Enrique de Pixabay

Une chronique de Christine Le Brun, Experte Smart Cities & Places chez Onepoint, où nous parlerons de villes, d’outils et de technologies numériques, de données, mais aussi des citoyens et de ceux qui font les villes.

Bonjour Christine Le Brun, aujourd’hui, direction Londres, une ville souvent citée en exemple quand on parle de smart city, et ce depuis un petit moment.

En effet, Londres fait partie, au même titre que Barcelone ou Amsterdam, de ces villes souvent identifiées comme pionnières en matière d’exploitation des technologies numériques au service d’un meilleur fonctionnement de la ville. Dans la foulée des JO de 2012 qui ont amorcé une grande vague de renouvellement urbain, en particulier dans l’est de la ville et dans le secteur de Stratford, Londres continue de se transformer. Pour ce faire, elle sait s’appuyer sur un écosystème varié et s’inspire de ce qui se fait partout dans le monde pour le décliner à son échelle. Du coté du numérique, il existe depuis 2013 une instance de gouvernance spéciale, le Smart London Board. Ce conseil est composé de personnalités du secteur technologique, d’entrepreneurs et d’universitaires. Ils conseillent le maire sur la manière dont Londres peut placer la technologie et les données numériques au cœur des enjeux de la capitale pour la rendre plus agréable à vivre, à travailler, mais aussi à visiter.

Et donc ce board est à l’origine de nombreuses initiatives, dont une plateforme de données qui est en perpétuelle évolution ?

Oui il s’agit d’un projet global qui vise à montrer de manière très concrète que la collecte massive de données est un levier pertinent pour gérer la ville plus intelligemment et anticiper les défis urbains de demain. Mais la vision n’est pas que technologique : elle cherche aussi à outiller la municipalité pour engager ses citoyens dans une aventure collective tournée vers l’avenir. 

Et d’un point de vue technique, qu’est ce que cette plateforme montre comme particularités ?

Elle repose sur une architecture très flexible et évolutive. Cela lui permet, de manière modulaire et souple, de bénéficier de plusieurs niveaux d’acquisition mais aussi d’analyse des données. Par exemple, la plateforme peut récupérer des informations issues des objets connectés comme les capteurs de stationnement ou de remplissage de poubelles. Elle peut dans le même temps se connecter à des applications utilisées par les citoyens, aux réseaux sociaux, aux caméras de surveillance du trafic ou aux services de mobilité partagée. C’est un véritable patchwork numérique qui permet d’agréger en temps réel des milliers de données sur les flux piétons, la météo, les structures énergétiques ou encore les réseaux de transports.

Et, pardon pour cette question peut être naïve, mais qu’est ce qu’on fait de tout ça ? Est-ce qu’il n’y a pas un risque que ce soit un fourre-tout et que la majorité des informations ne soient collectées et stockées pour rien ?

Alors Laurence cette question n’est pas naïve mais au contraire tout à fait pertinente. Il y a quelques années on parlait beaucoup de big data, et ce projet relève vraiment du même concept. Cependant, ce n’est pas parce qu’on a un projet global basé sur la collecte massive de données qu’il ne faut pas choisir ses combats, au risque de rater les opportunités d’agir avec un vrai impact. Londres s’est beaucoup concentrée sur les sujets de mobilité, d’environnement et d’énergie.

Par exemple ?

La plateforme fournit ainsi des données à des applications qui visent à mieux gérer les ressources, comme par exemple la régulation de l’éclairage urbain ou le pilotage de la gestion des déchets. Elle sert aussi à élaborer des indicateurs environnementaux qu’elle met ensuite à disposition des citoyens, comme l’affichage de la qualité de l’air par quartier, les alertes sanitaires, ou encore l’évaluation de la biodiversité en zone urbaine. Et les perspectives sont multiples : dans le domaine de la santé par exemple, en analysant précisément les données sur la pollution, elle peut contribuer à mettre en place des initiatives pour réduire l’exposition à ces polluants. Mais dans le même temps, ces informations peuvent être partagées pour soutenir les programmes de santé publique, auprès des écoles et des acteurs sociaux, dans le cadre d’actions de sensibilisation.

Et je crois d’ailleurs qu’ils insistent beaucoup sur cette dimension du dialogue citoyen via la plateforme ?

Tout à fait, Londres aime présenter cet outil comme une plateforme de nouvelle génération. Elle est tournée vers les habitants qui peuvent interagir de différentes manières : en fournissant des données, en participant à des consultations ou en étant destinataire des informations élaborées par la plateforme. Elle est aussi tournée vers l’extérieur. Elle s’inspire des initiatives d’autres cités, et exporte ses retours d’expériences dans d’autres villes. Il y a une vraie recherche de modèle collaboratif, rendu possible par son architecture ouverte. Chaque prototype peut être enrichi par la communauté locale ou internationale. Londres démontre ainsi qu’une smart city ne repose pas uniquement sur la technologie, mais sur le lien entre les acteurs, les expériences et l’intelligence collective durable.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.