Alors, avez-vous passé une bonne semaine ?
Au début, elle s’est très bien passée, mais vers la fin, les choses se sont regrettablement envenimées. Mais parlons d’abord de ce qui ne fâche pas. La première décision que je veux souligner peut paraître trop technique ou trop secondaire, mais pour moi, elle est l’une des clefs de notre avenir : c’est l’accord intervenu entre la Commission européenne et le Parlement européen sur un cycle de vie et de recyclage durable des batteries électriques de tous types, de la pile-bouton à la batterie de traction d’un véhicule routier ou ferroviaire. D’ici à 2030, les fabricants de batteries devront garantir la récupération de 73 % de leurs produits déchargés – c’est bien le moins, vu qu’à cette date, les besoins en batteries se seront multipliés par dix par rapport à aujourd’hui.
Autres points positifs de la semaine ?
Incontestablement, la nouvelle tranche d’aide financière d’un montant de 18 milliards d’Euros destinés à l’Ukraine pour faire face à ses besoins immédiats en 2023, mais aussi pour commencer à prévoir la reconstruction du pays lorsque les armes se seront tues.
Et c’est en fin de semaine que cela se gâte, si je vous suis ?
De prime abord, cela ne nous affecte directement ni vous, ni moi, mais c’est un sujet d’introspection majeur pour nos amis allemands que cette vague d’arrestations de comploteurs nostalgiques, non de l’Allemagne nazie, mais de son indirect prédécesseur, l’Empire allemand, créé en 1871 et effondré sur lui-même en 1918.
Tous n’étaient pas des inadaptés ou des lunatiques : dans leurs rangs se trouvaient une magistrate berlinoise et un officier-parachutiste de la Bundeswehr – et, surtout, leur futur roi (ou empereur, je n’ai pas tout saisi), un agent immobilier septuagénaire, descendant d’une famille régnante autrefois dans l’est de l’Allemagne, Henri XIII, Prince de REUß. Leurs sympathisants, convaincus de l’illégitimité de la République fédérale d’Allemagne créée en 1949, étonnent par leur nombre et par leur activisme, tenu jusque-là pour un simple sujet de plaisanterie. On ne rit plus, vu qu’ils avaient l’intention de prendre d’assaut le Reichstag et de saisir le pouvoir. On ne sait pas qui, d’HITLER ou de TRUMP, leur en avait inspiré l’idée.
A peu près au même moment, la même Allemagne se repassait, une énième fois depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine, le film des années MERKEL ; rares sont aujourd’hui, même parmi ses camarades de parti et anciens collaborateurs, à la défendre mordicus. Le discours convenu, c’est maintenant plutôt : ‘Elle se flattait de connaître les Russes, mais elle avait tout faux’.
Bon, abrégeons l’attente – qu’est-ce qui vous tellement démoralisé en fin de semaine ?
D’abord, ma perte de voix dont chacun a pu s’apercevoir vendredi dernier – mais ensuite, et plus gravement, ce sont les premiers éléments qui me sont parvenus vendredi d’un autre et pareillement vaste coup de filet des polices belge et italienne dans les milieux du Parlement européen.
L’une des quatorze vice-présidents de l’assemblée, la socialiste grecque Eva KAÏLI, et un ancien élu socialiste italien ont été interpellés, tout comme deux assistants parlementaires et le président de la Confédération syndicale internationale, précédemment secrétaire général de la Confédération européenne des Syndicats, Luca VISENTINI. On leur reproche d’avoir touché des sommes importantes de la part du Qatar pour influencer les députés européens en faveur du pays-hôte de l’actuel Mondial de Football.
Tout n’est pas clair dans cette affaire, il faudra bien se poser la question de savoir comment ces responsables politiques de premier plan ont pu se laisser aller à pareille complaisance rémunérée, et il faudra aussi déterminer à qui profite ce déballage, aussi vous en reparlerais-je lors de notre rendez-vous de l’édito’ de ce vendredi matin.
Et pour cette semaine, que prévoyez-vous ?
Je prévois qu’elle commencera comme la précédente s’est terminée, dans un flot croissant de révélations sur ce qui, dans mon souvenir, devrait – si tous les faits sont avérés – constituer le scandale le plus durablement dommageable pour le Parlement européen et pour l’UE dans son ensemble.
Et parmi les événements plus routiniers ?
Pour la routine, vous pourrez assurément trouver votre bonheur au Conseil des Affaires étrangères et au Conseil extraordinaire de l’Énergie, qui, tous deux, prépareront le Sommet européen de fin d’année jeudi, dont nous pourrons faire le bilan mardi prochain.
Quelques dates historiques ou autres à retenir cette semaine ?
Puisque vous insistez, voici :
- Aujourd’hui, lancement d’Ariane-5 porteur du satellite météorologique de troisième génération de l’Agence spatiale européenne. On oublie trop souvent de saluer les prouesses de ces agences et entreprises à 100 % européennes.
- Mercredi, dans le même domaine, cela fera cinquante ans que l’Homme aura posé le pied sur la Lune pour la dernière fois.
- Vendredi, Fête annuelle de l’Indépendance du Kazakhstan.
- Samedi, changement de Premier ministre en Irlande : dans le cadre de l’accord de coalition, Leo VARADKAR, de centre-droit, redevient chef de gouvernement en succédant à son allié, le radical de droite Micheál MARTIN.
Une dernière ?
Un conseil : si vous comptiez profiter de la décote de la Livre sterling pour passer un week-end prolongé à LONDRES – abandonnez sans tarder cette idée. Le 18 décembre, les cheminots partent en grève jusqu’au 27, suivis du personnel de sécurité de l’EUROSTAR. Le 20, ce sont les infirmiers, le 21, les ambulanciers et le personnel d’entretien de l’EUROSTAR, le 23, les postiers, le 24 (et jusqu’au nouvel an), les contrôleurs des services de l’immigration dans les aéroports.
Mais je ne veux pas vous laisser sans un rayon d’espoir : cet immense chaos, c’est seulement en Angleterre et au Pays de Galles – en Écosse, tout va bien.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.