L'Europe au plus près

L'Europe au plus près - Vendredi 1 Octobre

L'Europe au plus près - Vendredi 1 Octobre

Bienvenue dans cette édition de « L’Europe au plus près » où nous suivons, chaque semaine, l’actualité des différentes institutions de l’Union européenne. 

Cette semaine, penchons-nous sur les récents arrêts publiés par la Cour de justice de l'UE, et notamment deux arrêts portant sur les aides d'Etat en Europe, c’est-à-dire lorsqu’un Etat intervient pour soutenir une entreprise.

Oui, la cour de justice de l'UE a condamné mercredi 29 septembre la compagnie aérienne belge TUIfly et la compagnie irlandaise Ryanair à rembourser les 13 millions d'euros de subventions qu'elles ont reçu du gouvernement autrichien depuis 2016. La Commission européenne avait déjà jugé ces versements non conformes au droit européen, statuant que cela leur donnait un avantage sur la concurrence. TUIfly et Ryanair ont alors saisi la Cour de justice de l'UE pour contester cette décision, mais la Cour s'est rangée du côté de l'exécutif européen. Ryanair vient d'annoncer qu'elle fera appel de ce jugement.

Les Traités de l’Union européenne sont effectivement très restrictifs : “les aides d’Etat [...] sont incompatibles avec le marché intérieur” car “elles menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises”. 

Tout à fait ! Toutefois, des exceptions sont possibles : la Commission européenne a par exemple accepté que les Etats-membres soutiennent leurs compagnies aériennes ou bien le service ferroviaire Eurostar qui emprunte le tunnel sous la Manche, lorsque ces entreprises ont subi la chute brutale du nombre de passagers lors de la pandémie de coronavirus. 

Toujours en lien avec cette question des aides d'Etat, la Cour de justice de l'UE a délivré un second arrêt dans lequel elle donne raison à l'entreprise grecque Public Power Corp, la plus grande compagnie d'électricité grecque, dans un conflit qui l'oppose à un autre groupe, Myti lineos. Pouvez-vous nous expliquer un peu de quoi il s’agit ?

Eh bien, depuis 2013, un tribunal d’arbitrage public détermine le montant de la facture d’électricité du groupe industriel grec Mytilineos, un fabricant d’aluminium. Or, selon Public Power Corp, il s’agit là d'un tarif énergétique préférentiel, car Mytilineos paye l’électricité à un prix tellement faible qu’il ne couvre même pas les coûts de production. Il s’agirait donc d'une aide d'Etat déguisée. 

Public Power Corp a d’abord déposé deux plaintes devant la Commission européenne, mais celle-ci n’y a pas vu d'illégalité. Puis l’affaire a été portée devant le Tribunal de l’Union européenne à Luxembourg, lequel a rendu son jugement le 22 septembre dernier. 

Oui, le Tribunal a établi qu’il s’agit bien d’une aide d’Etat illégale. Par conséquent, les juges européens annulent la précédente décision de la Commission européenne, et ils n’hésitent pas à critiquer cette dernière. Selon eux, avec les moyens d’évaluations économiques complexes à sa disposition, l’exécutif européen aurait dû se rendre compte qu’il s’agissait bien d’une aide d’Etat.

Continuons ce journal en évoquant un autre arrêt de la Cour de justice de l’UE, portant cette fois-ci non sur une société, mais sur une personne. Il s’agit de Karel Pinxten, un ancien ministre belge, et ancien député européen. De 2006 à 2018, il a travaillé pour la Cour des comptes européennes, cet organe chargé de contrôler les dépenses de l’Union. Il est accusé de s’être enrichi personnellement avec le budget de l’institution.

En effet, selon une enquête menée par l’OLAF, l’Office européen de lutte antifraude, durant ses deux mandats d’auditeur à la Cour des comptes européenne, Karel Pinxten, aurait multiplié les abus. A travers la prise en charge de son carburant, de ses réceptions ou bien de ses voyages privés à Cuba ou en Suisse, il en aurait coûté au total près de 473 000 euros de frais à la Cour des comptes.

Karel Pinxten est également accusé de transmission d’informations confidentielles et de conflits d’intérêts.

Tout à fait, depuis 2002 jusqu’à cette année, il a été un membre actif du parti politique de l’Open Vld (l’Open Vlaamse Liberalen en Democraten ou « Libéraux et démocrates flamands »). Une activité politique incompatible avec son mandat d’auditeur européen au sein de la Cour des comptes, selon la Cour de justice. 

Dans son arrêt du jeudi 30 septembre, la Cour de justice de l’UE considère que Karel Pinxten a porté atteinte à l’image de la Cour des comptes européenne, et il se voit désormais privé des deux tiers de ses droits de pension liés à ses précédents mandats.

Oui, on parle ici d’une pension mensuelle de plus de 11 500 euros. Finalement, l’arrêt de la Cour de justice ne manque pas de souligner le manque de contrôle et de règles claires au sein même du personnel de la Cour des comptes, qui a rendu possible de tels agissements.

Terminons cette édition en évoquant l’affaire Kocner en Slovaquie. Le millionaire Marián Kocner est accusé d’avoir commandité le meurtre du journaliste d’investigation Jan Kuciak et de sa fiancée en février 2018. Mais en attendant son procès, l’accusé a déclenché lui aussi une procédure judiciaire auprès du Tribunal de l’UE, afin de poursuivre l’agence européenne de coopération policière Europol. Quel était l’objet de ce recours ?

Dans le contexte de l’enquête sur le meurtre du journaliste Kuciak, les autorités slovaques ont sollicité l’aide d’Europol pour extraire des données de téléphones appartenant à Marian Kocner. Or, en mai 2019, ces données personnelles ont été diffusées dans la presse slovaque et sur Internet. Marian Kocner s’estime donc victime d’une “atteinte à son honneur, à sa réputation professionnelle, et à son droit à la vie privée et familiale”. Il accuse directement Europol d’avoir divulgué lesdites informations, et pour cela, il réclame 100 000 euros de réparation.

Le Tribunal de l’UE a finalement décidé de rejeter le recours déposé par Marian Kocner, par manque de preuves. 

Oui, il a été établi que les données en question ont déjà été remises aux autorités slovaques en 2018, ce qui signifie que lors de leur diffusion dans la presse l’année suivante, plusieurs entités possédaient ces données, et pas seulement Europol. De plus, l’agence a déclaré n’avoir manipulé que des données cryptées, lesquelles sont impossibles à exploiter par la presse. Europol a donc été écartée de toute responsabilité dans cette affaire.

Thomas Kox - Romain L'Hostis

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