L'état de l'État de droit - Elise Bernard

Remous en Slovaquie

Remous en Slovaquie

Elise Bernard, docteur en droit public et enseignante à Sciences-Po Aix et à l'ESSEC, décrypte chaque lundi sur Euradio les implications concrètes de l'État de droit dans notre actualité et notre quotidien. Ses analyses approfondies, publiées sur la page Europe Info Hebdo, offrent un éclairage précieux sur ce pilier fondamental de l'Union européenne.

L’Etat de droit est en danger dans plusieurs pays de l’Union européenne, on en a déjà parlé plusieurs fois, mais cette semaine c’est la Slovaquie qui fait parler d’elle!

Oui Laurence, ce pays frontalier de l’Ukraine est d’abord toujours dépendant à plus de 90% des hydrocarbures russes, au point qu’il bénéficie encore pour cette année d’une exception sur l’embargo des importations pétrolières russes.

Mais alors la Slovaquie se retrouverait dans une situation de sécurité particulièrement précaire si son statut de membre de l’UE ou de l’OTAN était remis en question, comme semble le vouloir son gouvernement!

C’est ainsi que semblent le prendre de nombreux Slovaques. Avec la réduction des aides financières à plus de 130.000 réfugiés ukrainiens comme réponse à l'interruption de la livraison du gaz russe par l'Ukraine pour la Slovaquie, les contestations populaires croissantes dénoncent cette tentation de conciliation de Robert Fico avec le Kremlin.

On a vu des manifestants scander "la Slovaquie c’est l’Europe".

Eh oui et le mécontentement populaire se manifeste aussi avec ces 100 psychiatres slovaques qui ont adressé une lettre ouverte directement au Premier ministre. Ils font part de leurs inquiétudes face à un comportement qu'ils estiment de plus en plus autoritaire et manipulateur.

Ca s’est empiré avec la tentative d'assassinat à l’encontre du Premier ministre Robert Fico en mai 2024.

Très clairement! Les psychiatres dénoncent sa part de responsabilité dans l'émigration des Slovaques et son abandon des services publics. Ils pointent aussi une politique étrangère contradictoire à celle de l'UE et l'OTAN, notamment sur le conflit Ukraine-Russie.

Robert Fico refuse de désigner l’agresseur dans le conflit

Voilà. Et alors la réponse du Premier ministre confirme peut-être le diagnostic : elle est menaçante envers les initiateurs de cette lettre.

Oui, il les accuse de vouloir initier un “Maïdan” slovaque avec l'opposition avec le soutien d'ONG financées à l'étranger.

Un Maîdan, donc la guerre à l’issue! Il les accuse de profiter de leur position professionnelle pour contester les principes fondamentaux de la démocratie et par extension du résultat des élections législatives.

Comme si arriver à former une coalition gouvernementale à l’issue d’un vote en faisait un passe-partout démocratique!

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.