Michel Derdevet, président du think tank Confrontations Europe détaille dans cette chronique 30 propositions de 30 auteur·ices issues du livre "30 idées pour 2030" pour aborder autrement les élections européennes prochaines. Sur euradio.
Dans la chapitre 20 du livre « 30 idées pour 2030 », Claire Morel, membre du comité de direction de Syndex, un cabinet d’expertise au service des représentants des salariés et du dialogue social, engagée depuis près de quinze ans pour le développement du dialogue social, nous emmène sur le terrain d’une réflexion essentielle : afin d’accompagner les transitions numériques et environnementales de nos sociétés, nous avons besoin de la promotion du dialogue social européen.
Tout d’abord en quoi les transitions environnementales et numériques sont-elles inter connectées ?
Ces dernières années, le concept de “twin transition” s’est forgé pour associer la transition numérique et environnementale. Claire Morel met en évidence à quel point ces transitions bouleversent des pans entiers de nos économies, ainsi que les conditions de travail et d’emplois des salariés.
L’une et l’autre sont des défis de notre temps qui ont besoin d’être débattus, pensés de manière conjointe et holistique. Pour cela, nous avons besoin de construire et de pérenniser un cadre solide de gouvernance, non seulement afin de répondre aux objectifs européens, mais également dans le but d'accompagner les mutations et les changements provoqués par l'accélération des innovations technologiques et des changements de pratique. Autrement dit, nous devons nous donner les moyens d’une transition juste.
En quoi les travailleurs sont-ils directement concernés par ces évolutions et doivent prendre part à ce débat fondamental ?
La raison est simple : les travailleurs sont en première ligne face au réchauffement climatique ; l’intensification et la multiplication des événements extrêmes ont des impacts concrets sur la santé et les conditions de travail des salariés.
De manière plus structurelle, nous sommes amenés à reconsidérer nos organisations et nos modes de production que ce soit par respect de normes environnementales ou par adaptation aux transformations numériques : des secteurs vont connaître des difficultés croissantes, d’autres vont émerger, les modes de travail évoluent rapidement, de nouvelles compétences sont nécessaires… Il s’agit de penser, quel que soit les mutations engendrées, au respect des droits sociaux dans l’ensemble de ces mutations. Or, qui de mieux placés que les travailleurs pour témoigner, faire valoir leurs inquiétudes et contribuer à créer des solutions durables ?
Que signifierait concrètement une transition juste ?
Une transition juste, c’est l’anticipation de ces bouleversements, c’est une meilleure écoute des travailleurs et cela passe notamment par un dialogue social renforcé ! Nous devons créer un environnement qui permette de prendre en compte la voix des salariés et de leurs besoins.
Ainsi, le dialogue social européen est une composante essentielle pour mener une transition juste ?
Oui, en effet, et ce n’est pas une nouveauté. Voici près de quarante ans, Jacques Delors en avait déjà fait une priorité pour l’action qu’il allait insuffler au niveau de la Commission européenne, en instaurant les « entretiens de Val Duchesse ». Aujourd’hui encore, en 2024, le dialogue social reste une composante essentielle du modèle social européen. Et il est nécessaire de l’articuler à tous les niveaux, et aux différents échelons, territorial, national et européen. Ainsi, un cadre législatif européen et national devrait obliger à un dialogue social de qualité sur l’ensemble de ces sujets, avec des moyens suffisants et garantis et un cadre qui permette de garantir une information fiable et des consultations et négociations obligatoires.
Dans ce chapitre, nous détaillons avec précision, grâce à Claire Morel, les enjeux et les moyens pour un tel dialogue social européen, à la mesure des enjeux auxquels nous sommes toutes et tous confrontés.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron