Toutes les deux semaines sur Euradio, retrouvez « Fréquence Europe », la chronique de Radio Judaïca et l’Europe Direct Strasbourg, présentée par Olivier Singer.
Le commerce en ligne a transformé nos habitudes de consommation. Aujourd'hui, des géants chinois comme Shein, Temu ou AliExpress inondent le marché européen avec des offres imbattables. Cependant, derrière ces prix attractifs se cachent de sérieux problèmes.
Cela s’explique en partir car les colis d'une valeur inférieure à 150 euros bénéficient d'une exonération de droits de douane – une mesure dite « de minimis ». À l'origine, cette exemption fiscale visait à simplifier les échanges internationaux et à réduire les coûts administratifs liés aux nombreux petits envois. (Cette exonération fiscale existe aussi aux Etats-Unis). Le problème c’est qu’aujourd'hui, ce régime favorise l'import de produits qui ne répondent pas toujours à nos exigences en matière de sécurité (notamment avec le marquage CE), d'environnement, et de respect des droits fondamentaux, illustré par les préoccupations concernant les conditions de travail dans certaines régions sensibles. En moyenne, 12 millions de colis transitent chaque jour dans l'UE, dont 91 % proviennent de Chine, tandis qu'en France ces envois représentent désormais 22 % de toutes les expéditions, contre moins de 5 % il y a cinq ans. Face à ce flot grandissant, l'UE se doit d'agir rapidement pour protéger ses citoyens.
Quelles réponses l'UE envisage-t-elle pour encadrer ce flot d'importations et garantir aussi la sécurité des consommateurs ?
Pour répondre à cette situation, la Commission européenne souhaite s'attaquer à la réforme de l'Union douanière. Pour rappel, l'Union douanière harmonise les droits de douane appliqués aux marchandises importées dans l’UE (quel que soit l’Etat membre par lequel transit ces marchandises)
L'objectif de cette réforme est double :
D'une part, lever l'exonération fiscale sur les colis de faible valeur pour collecter environ 1 milliard d'euros de droits supplémentaires chaque année, afin de financer le renforcement des contrôles aux frontières ;
D'autre part, limiter l'afflux de produits non conformes qui surcharge les services douaniers et fausse la concurrence sur le marché européen.
A elles seules, ces mesures fiscales suffiront-elles à limiter les importations de ces petits colis ?
Non, et c’est aussi pour cela que parallèlement aux réformes douanières, Bruxelles (plus précisément la Commission européenne) a lancé des enquêtes ciblées sur les plateformes de e-commerce.
Shein, par exemple, fait l'objet d'investigations pour déterminer si la plateforme tolère la vente d'objets contrefaits, de produits de santé non conformes ou dangereux, et pour examiner la transparence de son modèle économique ainsi que son impact environnemental. Des enquêtes similaires sont en cours concernant TEMU et AliExpress. Ces démarches s'inscrivent dans le cadre du Digital Services Act (DSA), une réglementation européenne visant à renforcer la sécurité et la transparence des plateformes numériques, à lutter contre la désinformation et à obliger ces grandes plateformes à combattre également la contrefaçon.
Shein revendique avoir réalisé plus de deux millions de tests de sécurité en 2024 et prévoit d'investir 14 millions d'euros en 2025 pour améliorer ses contrôles, mais des interrogations subsistent.
L'Union européenne se trouve à nouveau à un tournant décisif : entre la réforme de l'Union douanière et les enquêtes sur les grandes plateformes, l’Union européenne cherche à encadrer un secteur en pleine expansion qui remet en cause les règles du commerce international.
L'enjeu est clair, garantir la sécurité des consommateurs et une concurrence juste, tout en respectant les normes de fabrication. Pour cela, il est aussi indispensable que chacun mesure l'impact de ses achats en ligne et opte pour une consommation plus responsable.