Entendez-vous la Terre ?

CoP30 : promesse tenue ou opportunité manquée ?

Photo de Denys Argyriou sur Unsplash CoP30 : promesse tenue ou opportunité manquée ?
Photo de Denys Argyriou sur Unsplash

« Entendez-vous la Terre ? », c’est le nom que porte la chronique réalisée par Fanny Gelin, étudiante en master Affaires Européennes à Sciences Po Bordeaux, qui décode pour vous chaque jeudi l’actualité environnementale de l’Union européenne.

Quels ont été les moments verts de la semaine qui vient de s’écouler ? On en discute tout de suite avec Fanny Gelin. Bonjour et bienvenue ! Alors dites-moi : quels ont été les moments verts de la semaine ?

La Terre nous emmène au Brésil cette semaine, ou plus précisément à Belèm, où se sont déroulées les négociations de la CoP30 sur le climat du 6 au 21 novembre. Cet évènement international marquait symboliquement l’anniversaire des 10 ans de l’accord de Paris conclu en 2015.

Donc si je comprends bien, la CoP a lieu tous les ans et traite uniquement de la lutte contre le dérèglement climatique ?

Alors pas exactement, Il existe en réalité plusieurs CoP. Cet acronyme vient de l’anglais Conference of the Parties et permet à tous les signataires d’une convention internationale de se réunir pour dresser le bilan des actions réalisées, des objectifs à atteindre et des engagements étatiques à prendre. La CoP à laquelle on pense le plus souvent est celle sur les changements climatiques qui découle du Sommet de Rio de 1992. Mais il existe aussi des CoP sur la biodiversité, sur la lutte contre la désertification et sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, dite CoP CITES. Et on ajoutera bientôt à cette panoplie une CoP sur la haute mer.

Pour revenir sur l’accord de Paris, qu’est-ce qui avait été prévu exactement lors de ces négociations ?

C’est justement l’accord de Paris qui a consacré les fameux objectifs de maintenir la hausse de la température moyenne sur Terre en dessous de 2°C par rapport à l’ère préindustrielle, et de préférence sans dépasser +1,5°C. Chaque Etat devait alors établir son objectif de réduction des gaz à effet de serre grâce à un mécanisme nommé Contributions déterminées au niveau national (CDN). Le problème, c’est que cet accord n’a visiblement pas été tenu car une hausse moyenne des températures de 1,5°C a déjà été enregistrée en 2024 et 2025.

Mais alors, cette nouvelle CoP à Belèm a-t-elle réussi à renforcer l’action de lutte contre le dérèglement climatique ? Quelles ont été les mesures adoptées à l’issue des négociations ?

Avant toute chose, il est important de préciser que la CoP30 ne se déroule pas qu’entre chefs d’Etat. Chaque pays envoie une délégation représentant le gouvernement, les collectivités territoriales, la jeunesse, les entreprises, le secteur associatif. A ces délégations nationales s’ajoutent des acteurs accrédités qui gravitent autour d’elles pour faire valoir leurs intérêts. Sauf qu’en y regardant de plus près, on s’aperçoit que certains intérêts sont bien plus représentés que d’autres : on comptait ainsi plus de 1600 lobbyistes des énergies fossiles pendant la CoP30. Ce qui explique que la conclusion de cette CoP soit encore une fois décevante puisque le rapport final ne prévoit aucune feuille de route pour sortir du fossile comme l’Union européenne le souhaitait.

C’est effectivement décevant qu’un accord n’ait pas été trouvé compte tenu de leur poids dans les émissions mondiales de gaz à effet de serre…

Ce n’est malheureusement pas tout. Il y a pas mal de points noirs, comme le fait que près de 211 jets privés ont atterri à Belèm ce qui équivaut à l’émission de l’empreinte carbone de 423 Français en un an. Ou encore le fait que le bilan de lutte contre la déforestation dont se targue le président brésilien Lula ne soit que le sommet de l’iceberg. Puisqu’il est par ailleurs favorable aux énergies fossiles et à l’industrie comme en témoigne l’autorisation d’exploitation accordée à l’entreprise Petrobras pour rechercher des réserves d’hydrocarbures.

Mais compte tenu de tous ces éléments, ne serait-il pas plus utile au contraire de déserter les CoP si leur issue est si décevante ? 

Il est difficile de répondre à cette question : d’un côté, les CoP sont l’occasion de faire entendre d’autres voix que celles qui sont habituellement écoutées, notamment celles de la société civile et des mouvements sociaux. D’autant que les négociations sont clés pour aboutir à des accords internationaux contraignants et ambitieux. Mais d’un autre côté, le manque d’efforts et d’engagements nous rappelle à quel point la lenteur et l’inaction finiront par nous coûter cher.

Merci Fanny. Je rappelle que vous êtes étudiante en master Affaires Européennes à Sciences Po Bordeaux.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.