Réforme de la PAC, les esprits s'échauffent autour de l'ajout d'une conditionnalité sociale pour le versement des subventions ; scandale en Hongrie pour le principal candidat à la CJUE ; crise sanitaire: le football européen appelle à l'aide ; la Roumanie met fin à la retraite spéciale des députés et sénateurs.
Réforme de la PAC: plus de 300 organisations européennes demandent l'ajout d'une conditionnalité sociale pour le versement des subventions.
Commençons ce journal avec l’envoi d’une lettre ouverte adressée aux institutions européennes. Une lettre qui relance le débat sur les droits des travailleurs dans le cadre de la réforme de la Politique agricole commune (PAC).
Oui, dans cette lettre publiée mercredi 17 février, ce sont plus de 300 organisations européennes qui demandent que les versements de subventions dans le cadre de la PAC soient conditionnés au respect des droits des travailleurs en termes de temps de travail, santé, ou encore de logement. Le Parlement européen a soutenu cette idée à travers l'adoption de plusieurs amendements en octobre dernier.
Les signataires de cette lettre déplorent que, dans le cadre de la réforme de la PAC des mécanismes similaires aient été décidés pour le respect des normes environnementales et du bien-être animal, mais que le respect des droits de l’homme et du travail ne soit toujours pas pris en compte dans l’attribution de ces subventions.
Oui, Kristjan Bragason, secrétaire général de la Fédération européenne des syndicats de l’alimentation, de l’agriculture et du tourisme (EFFAT), a déclaré que cette situation était “inacceptable [...] surtout lorsque la PAC représente un tiers du budget total de l’UE.” En Europe, les travailleurs de l’agriculture sont souvent des saisonniers ou journaliers. Ils sont donc particulièrement vulnérables à la précarité, et la présence dans ce secteur de nombreux migrants dont certains sont sans-papiers incite aux abus et à une dégradation de leurs conditions de travail.
Pourtant l’idée d’ajouter une conditionnalité sociale ne parvient pas à convaincre le Conseil de l’UE rassemblant les ministres de l’Agriculture des Etats-membres.
En effet, plusieurs options ont été proposées, notamment une vérification par la Commission européenne des conditions de mise en œuvre des plans stratégiques nationaux en matière d’agriculture avant d’approuver le versement des subventions. La possibilité de prise de sanctions judiciaires a même été évoquée. Aucune de ces propositions n’a cependant pour l’instant recueilli de majorité au Conseil. Des Etats comme la Hongrie, la Croatie ou la Lituanie dénoncent une surcharge bureaucratique inutile sur les employeurs agricoles qui sont déjà régulés par le droit national.
Hongrie : scandale pour le principal candidat à la CJUE
Dirigeons-nous vers la Hongrie où un scandale a éclaté à propos du candidat choisi pour siéger à la Cour de Justice de l’UE.
Oui sur la base des dispositions du Traité de Lisbonne de 2009, la Cour est composée d’un juge par Etat-membre et de 11 avocats généraux, chacun désigné pour un mandat de six ans renouvelable. Ce sont les Etats qui s’accordent pour nommer les juges parmi les candidats présentés. Selon les traités en vigueur, ils doivent être “choisis parmi des personnalités offrant toutes les garanties d'indépendance et qui réunissent les conditions requises pour l'exercice”.
La semaine dernière, la presse hongroise a pourtant révélé que le principal candidat hongrois à la Cour de justice de l’UE aurait été choisi unilatéralement, sans sélection formelle.
Tout à fait, aucune candidature publique ni aucune autre procédure de sélection officielle n’a été lancée. La ministre hongroise de la justice Judit Varga s’est contentée d’annoncer la nomination de Zoltán Csehi comme nouveau membre de la Cour de justice de l’Union européenne. Le candidat a déjà travaillé comme avocat pour le prédécesseur de la ministre hongroise, ce qui constitue une entorse de plus à la bonne gouvernance de la part de Budapest déjà en délicatesse avec l’Union sur nombre de sujets.
Crise sanitaire : le football européen appelle à l'aide.
Tournons-nous maintenant vers le domaine du sport où la crise sanitaire actuelle risque de faire entrer les clubs de football européens dans une grave crise financière.
Depuis maintenant presque un an, les matchs de football en Europe se déroulent à huis-clos. Les clubs ne peuvent donc plus faire de recettes les jours de match, et ils sont encore plus dépendants de leurs autres sources de revenus, notamment lorsque les diffuseurs passent des contrats avec les ligues de football pour acheter le droit de diffuser les matchs sur leurs chaînes. En France, la Ligue de football professionnel (LFP) espérait recevoir en 2020 plus d’1,2 milliard d’euros, notamment grâce au nouveau diffuseur espagnol Mediapro. Cependant l’échec de cette transaction a contraint la LFP à accepter l'offre de 680 millions d'euros avancés par Canal+, une offre deux fois moins élevée.
En France, la LFP redoute 1,3 milliard d’euros de pertes au terme de la saison, et elle a demandé à l’Etat « un plan d’urgence » pour le secteur.
En effet, le 16 février une réunion en visioconférence s’est tenue entre le ministre de l’éducation et des sports Jean-Michel Blanquer et certains présidents de Ligue 1. Les clubs demandent à pouvoir bénéficier du fonds de solidarité, auquel ont déjà accès les domaines de la culture ou du tourisme.
Mais un tel soutien paraît difficile à obtenir. Le gouvernement français a préféré insister sur l’échec de Mediapro qui est un facteur interne à la ligue 1, et qui n’a rien à voir avec l’épidémie de coronavirus.
Oui cette situation apparaît comme propre à la France, car au Royaume-Uni, en Espagne ou en Allemagne, les clubs professionnels ont engrangé des droits télévisuels presque identiques à la normale. Enfin, l'économiste Luc Arrondel pointe le “problème moral” que signifierait un soutien plus important des pouvoirs publics à des clubs considérés comme très riches par l’opinion publique.
Roumanie : fin de la retraite spéciale pour les députés et séntaeurs
Terminons ce journal par un détour en Roumanie, où les députés et sénateurs viennent de décider la suppression de leur retraite spéciale.
Oui, les Roumains ont accès à des retraites basées sur un système de cotisations sociales. Mais jusqu’à maintenant, les parlementaires bénéficiaient de retraites supplémentaires, dites spéciales, et qui coûtaient chaque année 6,9 millions d'euros à l'Etat.
La fin d’un privilège qui fait polémique.
En effet, certains comme le député Alexandru Moraru, membre du parti au pouvoir, le Parti national libéral (PNL) ont salué une bonne nouvelle pour la démocratie du pays. Mais d’autres groupes politiques comme l’Union démocratique magyare de Roumanie (UDMR) ont regretté que cette mesure n'ait pas supprimé d'autres régimes spéciaux de retraite dont bénéficient toujours d’autres catégories comme les maires ou les militaires. Malgré des efforts pour améliorer la situation, la Roumanie figure toujours parmi les pays les plus corrompus d’Europe.
Thomas Kox - Romain L'Hostis
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Image : Maruf Rahman