L’artiste européen de la semaine est Ivan Ave, de son vrai nom Eivind Øygarden, une figure majeure du rap norvégien.
Chapitre 1 : Mid Season
Norvégien, rappant en anglais, Ivan Ave a fait ses marques sur la scène hip-hop mondiale, traçant sa voie grâce à un rap fortement inspiré par le jazz et les 90s, créant son propre univers lyrique tout en collaborant avec des producteurs de renommée mondiale, MNDSGN, Dam Funk, Kiefer, et Kaytranada.
Son dernier album, Double Goodbyes, a à peine eu le temps de s’installer sur les étagères des disquaires qu’Ivan a sorti un nouvel EP en février dernier, Mid Season sur le label Mutual Intentions. On en écoute le titre What A Day!!! https://www.youtube.com/watch?v=E3WcULqLuLg
On se laisse facilement porter par la voix de baryton et la batterie jazz qui accompagne Ivan, dans des titres aux sonorités qui empruntent au hip hop et au R&B des 90s, notamment par l’omniprésence du synthé, qui a permis une réelle évolution du son du rappeur. Tout au long de Mid Season, le rappeur s'en prend régulièrement aux aspects ridicules de notre société contemporaine : il est le produit de sa génération, s’en rend compte, et laisse ses paroles refléter cela, d'une manière particulière qui oblige l'auditeur à démêler ces allégories surnaturelles :
Après What A Day!!!, voici Mid : https://www.youtube.com/watch?v=rHvelulwxbU
Un autre titre de l’EP Gear, est à retrouver dans la playlist d’Euradio.
Chapitre 2 : Un flow lyrique
Nous retrouvons l’artiste Ivan Ave, aka Eivind Øygarden. Après avoir introduit son dernier EP Mid Season hier, on s’intéresse aujourd’hui aux inspirations du rappeur norvégien, et à son processus d’écriture. On écoute son morceau Moves, qui provient du tout 1er album solo d’Ivan Ave : The Circle https://www.youtube.com/watch?v=27g6BS0AZtE
Ivan Ave a grandi à Telemark, en Norvège, une région entourée de montagnes, plus connue pour son héritage de randonnée, de littérature et de musique folk que pour le rap. Le rappeur en devenir a trouvé ses influences musicales dans les disques de pop, d’R&B et de jazz de ses grandes sœurs.
Une fois adolescent, Ivan s’est tourné vers la scène hip-hop, break dance, DJ et graffiti de la ville ; autant d’influences qu’il a emporté avec lui à New-York au début de la vingtaine, où a continué sa collection de disques. C’est en grande partie grâce à ce séjour qu’Ivan a fait de l’anglais sa langue de prédilection pour ses textes.
Comme on peut l’entendre dans The Circle, Ivan se distingue par son flow fluide, et ses ambiances d’hip-hop des 90s saupoudré de jazz. Et pour l’écriture de ses textes, Ivan est en constante recherche d’inspiration dans toutes sortes de styles lyriques : il s’imprègne d’énormément de poésie, notamment celle du musicien slameur et poète norvégien Fredrik Høyer. Ivan écrit des textes qui vont résonner avec les gens : il cherche le juste équilibre entre parler de faits quotidiens, basiques, et d’émotions et de sentiments, pour éviter de frôler un rap trop "mielleux".
Free Shit, issu du 1er album solo d'Ivan Ave, Helping Hands : https://www.youtube.com/watch?v=yCUCwUY2lq4
Chapitre 3 : Des amis et des vinyls
Ivan Ave est un artiste très prolifique depuis ses débuts en 2009 aux côtés de de son acolyte producteur Fredfades. On s’intéresse à leur collaboration de longue date dans le chapitre d’aujourd’hui : et c’est au son de Reaping, issu de leur album Fruitful, sorti en 2015. https://www.youtube.com/watch?v=lrqa3qLfT4s
C’est à son retour des Etats-Unis, où était parti Ivan quelques années je le rappelle, qu’il rencontre son tout premier collaborateur, Fredfades, à Oslo. Ensemble, ils forment Mutual Intentions, leur propre label de rap, collectif qui réunit plusieurs de leurs amis, et a permis de leur ouvrir les portes des collaborations à l’international. En 2009, ils ont sorti un EP commun, Brains, puis un album en 2014, Breathe, et un autre, Fruitful, en 2015.
DJ pendant un certain temps, et grand collectionneur de vinyls, Ivan Ave a une immense connaissance du jazz et de la soul, mais il ne fait pas ses propres productions. Ses amis sont beaucoup à faire du beatmaking, Fredfades en particulier. La collaboration des deux amis est simple : Fredfades crée des rythmes, Ivan choisit ceux qui l’inspirent, et écrit ses textes. En dehors de leurs albums et EP communs, les rythmes de Fredfades apparaissent donc sur la quasi-totalité des albums solo d’Ivan.
Toujours issu de l’album Fruitful, on écoute les talents de producteurs de Fredfades dans un parfait exemple : Phrase Three. https://www.youtube.com/watch?v=suJne7SbPCU
Chapitre 4 : Des yeux et des chaussures
Nous sommes toujours aux côtés du rappeur norvégien Ivan Ave, aujourd’hui, à l’écoute de l’un de ses albums les plus chill, Every Eye, sorti en 2017. Pour le découvrir, je vous propose d’écouter l’hommage à la légende du funk, George Duke. https://www.youtube.com/watch?v=_TYlPOtu3jo
Every Eye est le cinquième album studio d’Ivan Ave, sorti sur le label berlinois Jakarta Records, et sur lequel il innové en terme de productions et collaborations, en faisant appel à des producteurs avec qui il a peu travaillé : il y a toujours son habituel confrère Fredfades, mais aussi MNDSGN, Kaytranada, Dam-Funk.
Dans une interview, Ivan Ave dit chercher un équilibre entre s’exprimer sur des sujets importants dans notre société grâce à sa musique, et rester fidèle à lui-même, et ne pas transformer sa musique en activisme politique. C’est pourquoi il utilise des métaphores, et l’humour pour partager ses réflexions et inviter à l’ouverture d’esprit.
Le thème de la vision est omniprésent dans l’album Every Eye, que ce soit dans le titre de l’album où des tracks, par exemple : Now You See Me ; One Eye ; Old Eye ; Young Eye. Pour Ivan, l'œil est le point de départ de notre vision du monde, et ses paroles insistent sur la difficulté de chacun à s’extraire de son prisme pour obtenir une vision plus large du monde. Il relate que chacun réagit en fonction de ses expériences, de son éducation, de ses ambitions personnelles…
Le thème des chaussures revient aussi beaucoup dans l’album Every Eye d’Ivan Ave, le titre Running Shoes en est la preuve. Pour le rappeur, les chaussures sont l’allégorie de sa stabilité et de sa clairvoyance, puisqu’elles lui rappellent d’où il vient alors qu’il tente de garder les pieds sur terre : https://www.youtube.com/watch?v=_I1DQ6nekUs
Chapitre 5 : Triple adieux
La semaine passée aux côtés du rappeur norvégien Ivan Ave touche à sa fin… tout comme sa carrière dans le rap, comme laisse présager son dernier album Double Goodbyes, sorti en 2020. C’est au son de ces “deux aurevoirs” que l’on salue Ivan. On écoute d’abord son titre Good. https://www.youtube.com/watch?v=AilDZR2_AWI
La carrière d’Ivan Ave ne prend pas réellement fin, mais dans Double Goodbyes, c’est au rap à qui l’artiste dit d’abord au revoir : celui que l’on désignait un temps l’ambassadeur du hip-hop norvégien, prend une tournure bcp plus R&B, influencée par le jazz et la soul des 80, comme on a pu l’entendre en début de semaine, avec sa sortie la plus récente Mid Season et l’omniprésence du chant dans ses morceaux, du synthé, et de la guitare électrique…
Le morceau Good, le 1er de l’album, est une manière pour Ivan Ave de saluer ses auditeurs comme il se doit, après avoir passé 2 années de création, coupé d’eux. Il s’adresse donc à son old buddy, son ami de longue date, dès le début du morceau.
Avec Double Goodbyes, Ivan dit aussi au revoir à la décennie passée, celle de ses débuts. Il se tourne vers le passé, pour mieux préparer son avenir. Cet album lui permet de conclure la première partie de son parcours de rappeur : par exemple, dans le morceau Dooble’s Shout Outs, il fait une sorte de liste des personnes et des événements qui ont agrémenté son parcours. En attendant de pouvoir catégoriser sa musique autrement que du rap, on profite de l’atmosphère réconfortante de Double Goodbyes, qui contient une certaine nostalgie.
Et pour terminer la semaine, voici le morceau Triple Double Love. https://www.youtube.com/watch?v=FiMTF6STims
Pour écouter l'ensemble des chapitres de la semaine :
Rendez-vous la semaine prochaine pour vous présenter un·e nouvel·le artiste européen·ne émergent·e…
Suzanne Gerles