Révolution spirituelle

La robustesse en réponse au culte de la performance

La robustesse en réponse au culte de la performance

Dans cette chronique, Nathalie Richard, coach et facilitatrice en transition intérieure et gardienne d’un écolieu dans le Finistère, tente de démystifier un sujet aussi mal compris qu’oublié : la spiritualité.

Cette semaine on va parler de robustesse et de sa cousine la performance.

Cette semaine je vous parle d’une idée que je trouve géniale !

Une idée qui, mine de rien, est une véritable révolution culturelle.

Peut-être même spirituelle dans le sens où elle change notre façon d’être au monde.

Cette idée c’est celle de la robustesse.

Alors dit comme ça, peut être que ça ne vous évoque pas grand-chose.

Plus précisément, il s’agit de la robustesse en contre point de la performance.

Cette idée elle est propulsée en ce moment par un chercheur en biologie et bio physique, Olivier Hamant.

En prenant conscience de son impact potentiel et en réalisant l’urgence de notre situation civilisationnelle il a lui-même décidé d’être moins performant dans sa carrière de chercheur pour en parler publiquement.

Il a écrit un tract aux édition Gallimard appelé :  Antidote au culte de la performance : la robustesse du vivant.

Mais, en quoi faudrait-il trouver un antidote au culte de la performance ?

Olivier nous raconte déjà, histoire de poser le contexte, que nous avons quitté le monde de la continuité pour entrer dans le monde des ruptures.

Nous sommes entrés dans un monde fluctuant avec des disruptions sociales comme écologiques de plus en plus fréquentes.

Et d’après lui, nous y sommes arrivés car nous avons tout optimisé.

Car nous sommes, comme il dit, dans un monde ou la valeur cardinale est la performance.

Eh oui, les 2 sont intimement liés car quand on optimise on augmente les performances.

C’est-à-dire que l’on atteint notre objectif avec encore toujours moins de moyens.

Pour s’en convaincre, il suffit d’ailleurs de regarder nos journées : l’enchainement des RDV, le tunnel du 18 – 20 pour les parents,  nos agendas surchargés, les livraisons optimisées, les notes pour les enfants,  les évaluations, les KPIs et le toujours plus pour les grands.

La liste est longue.

Tout est soumis à la performance et l’optimisation.

C’en est devenu effrayant.

Effectivement, nous avons été élevé.e.s dans l’idée de performer, quel est le problème au fond ?

Oui c’est vrai. Être performant est ce qui est valorisé socialement.

On nous le transmet d’ailleurs dès le plus jeune âge à l’école,

Et on le cultive pendant le reste de notre vie en entreprise, dans le sport, via les films…etc.

La performance est omni présente, elle est devenue un mode de vie.

Pourtant comme nous l’explique Olivier, comme un contre-pied :  Optimiser fragilise.

Optimiser crée des effet rebond.

Et optimiser nous rend obsédés des indicateurs et nous en fait perdre notre rationalité.

Pour la fragilité, il suffit de nous souvenir des ruptures d’approvisionnement liées au Covid ou au blocage d’un porte conteneur géant dans le canal de Suez en 202 paralysant ainsi le commerce mondial.

Pour l’effet rebond, prenons l’exemple des frigos très énergivores dans les années 60 dont les systèmes ont été optimisés depuis. On pourrait croire que c’est une bonne chose mais insidieusement on en produit plus ils sont optimisés plus on en produit avec au passage tout un tas de dérivés.

Et pour la perte de rationalité et de bon sens, prenons l’exemple du sport.

La recherche de performances a par conséquent introduit le dopage.

On parle même depuis 2023 de la possible arrivée de jeux dits augmentés.

Des jeux qui autoriseraient le dopage et d’autres système d’augmentation de l’humain pour toujours plus d’exploits quitte à y laisser sa vie et en oubliant complètement l’esprit de partage, de plaisir et de participation ce même pour quoi faire du sport est sympa.

Et en quoi cela est grave Nathalie ?

Quand on met l’accent sur la performance, on met l’accent sur la compétition et donc sur la violence.

Le sport de haut niveau est violent pour les corps d’ailleurs, les athlètes ne peuvent y rester longtemps.

La culture de la performance devient la culture de la violence sur soi, autrui et in fine les écosystèmes.

Le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité, les pollutions et les inégalités en tous genres en sont les traductions.

Pour résumer : le culte de la performance crée un burn out des humains comme des écosystèmes.

Ce que nous vivons est donc une crise culturelle,  il va falloir, entre autres, remettre en cause la valeur performance.

Mais peut-on vraiment imaginer une société qui cesse de créer des organisations et des humains performants quand nous y sommes tant acculturé.e.s ?

C’est vrai que l’actualité pourrait nous en faire douter.

Clairement ce ne sont pas les entreprises mastodontes multinationales ou l’administration outre atlantique qui nous en convaincra.

Cette classe a n’a aucun intérêt à scier la branche sur laquelle elle est assise.

Sauf que les sociétés ne changent pas par ce qui fait le cœur de leur système.

Un système change toujours par ses marges.

C’est ce qui se passe à la périphérie qu’il faut observer, dans notre cas :  les collectifs citoyens, les petites entreprises ou états déjà soumis et vulnérables aux fluctuations.

Et puis levons le nez, regardons le vivant non humain tout simplement.

Il a des millions et des millions d’années de R&D !

Et vous savez ce qu’il nous apprend ? Attention c’est assez bluffant, en tous cas pour nous en Occident.

Les êtres vivants sont robustes avant d’être performants.

Un exemple typique c’est le roseau.

Il courbe mais il ne rompt pas sous le vent.

Alors peut-être est-il temps de ringardiser la performance  en tous cas de la remettre à sa place.

Si nous voulons en faire autant par ces temps turbulents.

On continue la semaine prochaine  histoire de laisser un peu de suspens et surtout le temps de la digestion.

Robustement vôtre comme on dit maintenant.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.