L'agroécologie, notre rapport à la nature

Valeurs humaines et sociales en agroécologie

© Photo de Zoe Schaeffer sur Unsplash Valeurs humaines et sociales en agroécologie
© Photo de Zoe Schaeffer sur Unsplash

Mouvement social ou politique, discipline scientifique... l'agroécologie est décidément un terme que tout le monde connait, rejette ou revendique. Dans cette chronique, Edith Le Cadre-Barthélémy, professeure à l'Institut Agro Rennes Angers, décrypte, sur euradio, les différents sens de ce mot.

Aujourd’hui Edith Le Cadre, vous souhaitez aborder des notions d’équité et de valeurs humaines associées au modèle agroécologique

La prise en compte des valeurs humaines et sociales est un élément central de l'agroécologie, notamment les questions d'équité et de justice sociale dans les systèmes alimentaires, le soutien à l'autonomie et au bien-être des producteurs de denrées alimentaires.

Nous avons maintes fois évoqué les différentes dimensions de l’agroéocologie technico scientifique, socio politique mais une dernière dimension, ontologique et expérientielle est également intéressante. Dans cette dernière dimension, il s’agit de comprendre comment l’agroécologie contribue à des compréhensions différentes du rapport à la nature.

Avec ce cadre d’analyse, le travail défini par les pratiques agroécologiques qui exige des compétences et un apprentissage permanent, est reconnu par certains comme donnant plus de sens ou d'épanouissement aux agriculteurs et agricultrices. En effet, ils et elles doivent être très attentifs aux processus qui se déroulent au sein des agroécosystèmes, travailler avec une gamme variée de cultures et d'animaux, et constamment observer et acquérir de nouvelles compétences en raison de complexité des connaissances à mobiliser en agroécologie.

Le défi que représente ce type de travail peut le rendre stimulant et agréable ; le travail agroécologique peut contribuer à renforcer l'autonomie en demandant aux agriculteurs et agricultrices d'utiliser leur créativité et leur ingéniosité pour accroître leur capacité à appliquer les principes écologiques sur leurs exploitations tout en développant des stratégies de marché viables. Les agriculteurs et agricultrices peuvent alors avoir le sentiment d'apporter une contribution importante à leur communauté et de soutenir à long terme l'écosystème et la santé humaine.

Il y a donc une dimension sociale très forte ?

En effet, les approches agroécologiques mettre l'accent sur davantage de compétences sociales, sur la nécessité d'instaurer la confiance au sein de leurs communautés, de travailler en réseau et d'apprendre des autres, et d'entreprendre des actions collectives à l'échelle du paysage

Au final, les conditions de travail peuvent modifier les perceptions ou approfondir les relations avec différentes espèces végétales, ou animales.

Au final, se pose la question de la relation entre l’agroécologie et la notion de bien-être. Si on définit le bienêtre comme une dimension qui transcende l'individu pour englober son interaction avec les autres membres de la société et la manière dont il est satisfait de sa situation de vie alors le bien-être est une notion qui suggère qu'au-delà des besoins physiques, il existe des besoins sociaux et psychologiques qui doivent être satisfaits pour qu'un être humain ait atteint un bien-être total.

Plusieurs études ont établi un lien entre l'utilisation accrue des méthodes agroécologiques, le bien-être social et l'autonomie des agriculteurs en Europe et ailleurs.

Un point également très important dans cette notion de bien être est la santé mentale.

Une étude a montré que l'agroécologie jouait un rôle important dans l'amélioration de la santé mentale grâce à l'amélioration de la sécurité alimentaire, de l'équité entre les sexes, et au soutien entre pairs. Ainsi pour des femmes, les risques de dépression étant inférieurs de 32 % chez les femmes ayant participé à une intervention agroécologique participative par rapport au groupe de contrôle.

Il y aurait beaucoup d’autres à développer, notamment l’équité de genres en agroécologie, mais nous auront le temps d’en discuter lors d’une prochaine chronique

Un entretien réalisé par Laurence Aubron

Cette chronique est basée sur les travaux de :

Bezner Kerr R, Liebert J, Kansanga M, Kpienbaareh D (2022) Human and social values in agroecology: A review. Elementa: Science of the Anthropocene 10 (1). doi:10.1525/elementa.2021.00090