Chaque semaine, Lyudmyla Tautiyeva nous propose un aperçu de ce qu'il se passe aux frontières de l'Union européenne, traitant de sujets divers tels que la gouvernance, l’entreprenariat, ou encore l'innovation.
Le 9 octobre, le Parlement européen a débattu de la présidence hongroise du Conseil de l'UE et a critiqué les priorités du président hongrois Viktor Orban, notamment son opposition à la transition écologique, l'une des grandes priorités de l’UE.
Il n’est pas anodin qu’un pays comme la Hongrie, dont la moitié des imports de gaz proviennent de la Russie, s’oppose à la transition écologique.
Le président hongrois, Viktor Orban, est connu pour ses accointances avec Vladimir Poutine. Il apparaît dans le paysage de l’Union européenne comme un représentant de la politique de Moscou, empêchant notamment la prise de décisions à échelle européenne en faveur d’un soutien plus important à l’Ukraine (par exemple, le plan Ukraine Facility qui souhaitait accorder 50 milliards sur trois ans à l’Ukraine).
L’importante dépendance de la Hongrie au gaz russe, deux ans après le début de la guerre en Ukraine, contraste avec la réduction de cette même dépendance au niveau de l’Union européenne, et témoigne alors du profond impact qu’a eu l’invasion russe sur le système énergétique européen.
Quel a été l'impact de la guerre en Ukraine sur le système énergétique de l'Union européenne ?
La guerre en Ukraine à rendu évidente la forte dépendance de l’Union européenne au gaz russe. En 2021, celui-ci représentait 41% des imports de gaz en Europe ; pourcentage qui a assurément augmenté suite à la construction du nouveau Gazoduc Nord Stream 2.
Lorsqu’une économie dépend principalement d’une seule source d’énergie, ici le gaz, il suffit d’avoir un différend avec le fournisseur de cette source pour observer cette réalité qu’est le chantage énergétique, ayant de graves conséquences pour l’économie et la société d’un pays.
Poutine a joué de ce chantage gazier contre l’Europe au début de l’invasion de l’Ukraine, et c’est cela qui a suscité les mesures de diminution des imports de gaz russe.
Comment l'Europe a-t-elle réussi à réduire ses importations de gaz russe ?
La mesure immédiate a consisté à diversifier les imports. Cette diversification est passée par l’augmentation des imports de gaz naturel liquéfié (GNL) provenant des États-Unis et de la Norvège. Cela a permis de passer de 41% à 8% d’imports de gaz russe en Europe en 2023.
Actuellement, la Norvège constitue 30% des imports de gaz en Europe.
Les mesures de diversification sur le long terme sont notamment la mise en place du Pacte vert européen (Green Deal), qui prévoit l’augmentation de l’utilisation des énergies renouvelables.
La Hongrie continue d’importer beaucoup de gaz russe, mais est-elle le seul pays de l'UE à le faire ?
L’Autriche et la Slovaquie sont également des pays très dépendants aux importations de gaz russe. Plus pour longtemps cependant, car le gazoduc qui les fournit, jusqu’à présent, cessera cette activité en 2025. Il s’agit du seul gazoduc ukrainien qui continue d’opérer et de fournir du gaz russe depuis février 2022, mais son contrat de transmission de gaz expire fin 2024 et ne sera pas renouvelé.
L’Autriche, qui est encore dépendante à 90% au gaz russe, a récemment signé un contrat avec la Turquie pour diversifier ses sources, tout comme la Hongrie et la Slovaquie. Cependant cela ne suffira pas pour passer l’hiver. De fait, des discussions sont en cours pour une alternative potentielle que serait le gaz azerbaïdjanais, qui pourrait passer par le gazoduc ukrainien.
Plusieurs experts sont sceptiques sur la capacité de l’Azerbaïdjan à remplacer les volumes que fournissait le gaz russe à l’Europe, et alertent sur les risques d’un gaz russe dissimulé.
Même si l'UE achète encore du gaz russe, est-ce que ses efforts pour diversifier ses importations renforcent réellement son indépendance énergétique ?
À terme, l’ensemble des mesures de diversification, mises en place en réaction à l’invasion russe en Ukraine, ont précipité la réduction de la dépendance au gaz russe de l’Union européenne, et ont accentué le besoin d’accélérer le développement des énergies renouvelables.
Ainsi, renoncer à acheter du gaz russe, qui finance par extension l’armée de Vladimir Poutine, à contribué à la sécurité énergétique de l’Union européenne.
Une interview réalisée par Laurence Aubron.