L’artiste européenne de cette semaine est Cate Le Bon, une chanteuse, productrice et multi-instrumentiste galloise. Cate chante aussi bien en gallois qu’en anglais, le tout, dans 6 albums, 3 EP, et de nombreux singles produits depuis 2007. Qui est Cate Le Bon ? Nous tâcherons de le découvrir cette semaine, en 5 chapitres.
Chapitre 1 : POMPEII
Cate Le Bon vient tout juste de sortir son dernier album, son 6ème, Pompeii, paru vendredi dernier, le 4 février. On le découvre au son du morceau Running Away.
Pompeii est un album né de l’isolation de Cate pendant la pandémie. Le résultat sonore est très minimaliste étant donné que ce fut l’une des premières fois que la multi-instrumentiste réalise un album quasi entièrement seule : l’album reflète grandement son monde intérieur, avec des paroles très directes, alternant entre introspection et ironie. Par exemple, le titre de l’album, Pompeii, convoque l’apocalypse en faisant référence aux catastrophes présentes - la pandémie, et l’urgence du réchauffement climatique - et passées. Cate Le Bon partage une métaphore pour accompagner ce nouvel album : "telle la lave d’un volcan, la vie bouillonne, se ride, fond, durcit, et se reconfigure de manière imprévisible". Une image qu'elle souhaite faire refléter dans sa musique.
Chapitre 2 : Sensibilité infantile
Pour mieux comprendre le développement de la sensibilité musicale de la chanteuse et multi-instrumentiste, nous remontons le temps, toujours au son du dernier album de Cate Le Bon, Pompeii : voici Remembering Me
Née Cate Timothy en 1983, Cate a toujours vécu dans la campagne du Pays de Galle, entourée d’animaux. Pour ses 13 ans, elle reçoit une chèvre en cadeau. C’est donc dans un cadre de vie magnifique que Cate Le Bon a développée une sensibilité au monde digne d’une plante. Une sensibilité qui transparaît dans ses créations : son morceau Remembering Me, est une réflexion de Cate sur son propre processus créatif. Elle se remémore ses crises existentielles et créatives, et nous fait entrer dans son journal intime et névrotique. Nous pouvons l’observer remettre en question son héritage et son besoin désespéré de se mythifier.
Et depuis toujours, Cate a une certaine pudeur, et étonnement pour une performeuse, craint beaucoup l’idée d’avoir une audience, d’être observée. Elle refuse de s’imaginer d’extérieur : elle n’a jamais dansé devant un miroir, et n’a jamais regardé de vidéos de ses performances. Comme on peut s’en douter, Cate Le Bon déplore aussi les réseaux sociaux, et n’utilise Twitter et Instagram que par contrainte, pour son travail.
Chapitre 3 : Exil créatif
L'album précédent Pompeii de Cate Le Bon, est Reward, sorti en mai 2019. Il est lui aussi le fruit créatif de l’exil de la chanteuse. On le découvre, au son du morceau The Light.
En 2019, Cate Le Bon a donc passé une année solitaire, dans le Lake District, au Nord-Est de l’Angleterre, isolée dans une cabane, avec l’intention de se consacrer au travail du bois, et d’échapper à son manque d’inspiration musicale. Le jour, elle s’adonnait à la fabrication de meubles en bois, et la nuit, elle retrouvait les plaisirs de jouer à son piano. C’est de ses nuits solitaires qu’est né son album Reward.
Pendant ces mois de solitude, quelques amis musiciens ont rejoint Cate pour ajouter basse, percussions et saxophones à son piano solo. Et pour la première fois sur l’un de ses albums, Cate Le Bon a été créditée comme la productrice de Reward, rôle qu’elle était plus que prête à endosser au vu de ses précédentes productions pour d’autres artistes, et la minutie qu’elle applique à tous les aspects de son travail.
Chapitre 4 : Un musée de mugs
Notre promenade dans les paysages verdoyants et féériques du Pays de Galles se poursuit. Nous découvrons Mug Museum, un album plus ancien de Cate Le Bon, sorti en 2013. Voici Are You With Me Now ?
Bien que la présence d’une guitare pop et légère peut faire penser le contraire, Mug Museum est un album de rock psychédélique. Avec des morceaux old school qui nous font voyager tout droit dans les 60s. Cate Le Bon passe aussi bien d’une pop gentille et policée, à des distorsions électriques, et sa voix de l’hyper-aigüe, à l’hyper grave. Mug Museum est alors l’album le plus brut et le plus audacieux de Cate Le Bon lorsqu’il sort en 2013. Cate utilise le mug, objet absolument commun, comme métaphore de la musique pop, style musical qui peine à se réinventer au moment de l'écriture de l'album. Elle accompagne alors son projet d’une série de mugs en céramiques qu’elle façonne sous différentes formes, de la même façon qu’elle crée sa musique.
Chapitre 5 : Féerie galloise et rock californien
Après avoir évoqué plusieurs facettes de Cate Le Bon, au son de plusieurs de ses 5 albums, c’est maintenant le goût pour la collaboration de l’artiste et son processus créatif qui nous intéresse. On écoute Time Between, un titre de Cate Le Bon et son partenaire sur scène comme dans la vie, Tim Presley :
Nous commençons à le comprendre, à travers notre découverte du travail de Cate Le Bon, la chanteuse a un processus créatif particulier. Elle n’hésite pas à user de moyens drastiques pour créer : entre autres, s’isoler pendant 1 an dans une cabane. La chanteuse est aussi dévouée qu’une nonne à son processus créatif. Mais surtout, Cate enrichit son travail de collaborations avec d’autres artistes. L’une des principales : le duo qu’elle forme avec le guitariste et chanteur américain Tim Presley. Ils sont partenaires sur scène sous le nom DRINKS depuis 2015, créant le combo unique d’une chanteuse galloise féerique avec le rock garage californien.
Time Between est un morceau tiré du premier album du duo DRINKS, sorti en 2015, Hermits on Holiday. Un album de rock psychédélique, dans lequel Tim et Cate se sont laissé porter par leur spontanéité créative. En interview, ils décrivent que leur processus créatif était semblable à deux ados qui s’enferment dans une chambre et se mettent à jouer des instruments.
Et c'est sur cette collaboration que s'achève cette semaine consacrée à l'extraordinaire Cate Le Bon.
Pour écouter l'ensemble des chapitres de la semaine :
Rendez-vous la semaine prochaine pour vous présenter un·e nouvel·le artiste européen·ne émergent·e…
Suzanne Gerles