Comme chaque semaine, nous retrouvons Olivier, directeur au département d'études politiques et de gouvernance européenne au Collège d'Europe pour sa carte blanche sur la Présidence française de l'Union européenne.
Oui et non. Non, parce que c’est une initiative conjointe des principales institutions européennes, prise bien avant le début de la PFUE. Elle n’a donc pas de lien spécifique avec celle-ci.
Ceci étant, l’idée d’une grande conférence, largement ouverte aux citoyens, a été lancée par Emmanuel Macron. Il s’en est d’ailleurs prévalu dans son discours de présentation du programme de la PFUE, le 9 décembre 2021, en rappelant qu’il avait fait cette proposition au printemps 2019. Son objectif était de s’appuyer sur les résultats de la Conférence pour prendre des initiatives fortes au nom des citoyens européens.
Mais, en raison du Covid, la Conférence a été retardée d’un an : elle devait débuter le 9 mai 2020, pour la journée de l’Europe, et n’a débuté que le 9 mai 2021. Et on ne peut pas raisonnablement escompter qu’elle formule des propositions précises en moins d’un an …
En quoi consiste cette Conférence ?
C’est un dispositif ambitieux, avec quatre composantes principales :
- Une plateforme internet multilingue, permettant à tous les citoyens de s’exprimer
- Des milliers d’événements organisés à l’échelle locale, dans les 27 États membres
- 4 panels de 200 citoyens tirés au sort, qui débattent de différentes thématiques, au fil de plusieurs rencontres virtuelles ou réelles
- Une conférence plénière, composée d’acteurs des institutions et de représentants des panels de citoyens, chargée de faire la synthèse de tout cela.
Le mandat de la Conférence est très large : elle peut réfléchir sur tous les aspects de l’intégration européenne, des politiques aux institutions, en passant par ses valeurs et ses objectifs.
Mais la Conférence fait-elle partie des objectifs de la PFUE ?
Oui, parce que l’un des 4 grands thèmes du programme de la PFUE, « une Europe plus humaine », y fait spécifiquement référence. Je cite : « rebâtir un élan fondateur afin de repenser la vocation humaniste de l'Europe, plus efficace, plus proche de nos concitoyens est essentiel. C'est l'objectif de la Conférence sur l'avenir de l'Europe qui livrera ses conclusions en mai 2022. »
La Présidence française a tout fait pour que la Conférence rende ses conclusions – ou au moins des conclusions intérimaires – dès le printemps 2022, de manière à pouvoir prendre des initiatives. Les conclusions seront très diverses, mais on peut en attendre la réorientation de politiques existantes, le lancement de nouvelles initiatives et une réforme institutionnelle.
La France peut-elle en tirer des bénéfices concrets ?
C’est l’intention d’Emmanuel Macron. Malgré le calendrier très serré, il a dit et répété qu’il veut se servir des résultats de la Conférence pour alimenter la réflexion sur l’intégration européenne, sur les moyens de la rendre, selon son vocabulaire, « plus humaine ». Plus précisément, il veut la rendre plus démocratique et plus simple.
Cela semblait mal parti, mais le changement de majorité en Allemagne ouvre de nouvelles perspectives. La nouvelle coalition est en effet fondée sur un accord détaillé, qui comporte un chapitre ambitieux sur les questions européennes. Désormais, il n’est plus complètement exclu – comme c’était encore le cas il y a deux mois – d’envisager une réforme des traités à moyen terme, notamment pour réviser les institutions et le mode de fonctionnement de l’Union. Cela ne se fera pas sous présidence française, mais elle peut lancer le mouvement.
Olivier Costa au micro de Laurence Aubron
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